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mercredi 27 juin 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 10

ASHTAVAKRA continue :

X  
ASHTAVAKRA : Quand le désir, notre ennemi, et les objets, pleins de non-sens, et notre destin ici-bas, cause des deux premiers, quand tout cela a disparu, rien nulle part ne peut capter ton attention. ||1||

Comme la magie d’un rêve qui peut durer trois jours ou cinq, regarde tout ce qui t’échoit : cadeaux, épouse, maison, richesse, terre et amis. ||2||

En quelque endroit que le désir surgisse, sache que là coule un monde éphémère. Tourné vers un détachement complet, tout désir alors disparu, tu peux atteindre à la tranquillité. ||3||

La nature d’un lien est d’être pur désir. Qu’il disparaisse, on parle alors de liberté. Le simple non-attachement au monde donne la joie de la gagner à chaque instant. ||4||

Toi seul es la conscience que rien n’affecte. Mort est ce monde, tout comme l’est le non-être. Même l’ignorance n’est rien, elle. Qu’est ce désir de connaissance qui subsiste encore en toi ? ||5||

Royaume, enfants, épouses, incarnations physiques et bonheurs, même si tu leur es attaché de tout l’être, cela est déjà mort, vie après vie. ||6||

Assez de choses, assez de désirs, assez d’actions même bien faites. Dans la jungle du monde mouvant, la pensée n’en est jamais rassasiée. ||7||

Pendant combien de vies n’as-tu pas accompli l’action avec ton corps, ta pensée, tes paroles, l’action épuisante et funeste ? Dès aujourd’hui, à cette action, mets un terme définitif. ||8||

Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 10 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 11

vendredi 22 juin 2012


Et si l'universel était une forme d'égoïsme ?
Avec l'essayiste Caroline Fourest.

Caroline Fourest et Raphaël Enthoven tentent de répondre aux questions philosophiques qui tournent autour de l'universel

Tous nos semblables sont différents... Faut-il accorder sa préférence à ce qui nous identifie les uns aux autres ou bien à ce qui nous distingue ? 

Comment souscrire à l'universel sans verser, paradoxalement, dans l'ethnocentrisme ? Est-ce aux dépens d'autrui qu'on voit en lui notre alter ego ? 

Et si l'universel était une forme d'égoïsme ?
Comment être universaliste sans se prendre soi-même pour une norme ?

Comment, à l'inverse, respecter les différences sans verser dans l'indifférence ?
 
(France, 2011, 26mn) ARTE France

En effet, Rinpoché (mon maître pardon) pas lus tard qu'hier soir nous rappelait que se focaliser seulement sur la nature de l'esprit et sur sa réalisation absolue nous coupait du relatif et donc les maîtres de folle sagesse (comme  lui aussi donc) travaillent avec nous principalement sur le relatif, en mettant des battons dans les roues de notre ego (pas de nous).   
Et personnellement, je trouve que la SEP en fait partie comme moyen habile face à l'ego (toujours destructeur) afin de le révéler (révéler nos tendances karmiques nocives pour l'éveil complet) et nous permettre de le purifier. C'est comme dit il habituellement "faire sortir le jus de chaussette pendant la lessive, ensuite on rince à grande eau et là c'est purifié".

Bref le maître de folle sagesse fait sortir notre jus de chaussettes sales, c'est un des moyens habiles relatifs de la pratique, issus de la philosophie et psychologie bouddhique (les Abbhidharma). 

Cela rejoint tout à fait ces préoccupations : travailler sur soi avant de prétendre pouvoir améliorer le monde qui nous entoure.

  http://videos.arte.tv/fr/videos/philosophie-6737542.html
Rassembler plutôt que ressembler
Droit à l'indifférence plus qu'à la différence

Où Commence l'universalisme et
où commence l'impérialisme ?

Où commence la bienveillance
et où commence l'ingérence ?

 L'universel n'est pas manichéen ni moraliste.

mercredi 20 juin 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 9

ASHTAVAKRA continue :


IX  
ASHTAVAKRA : Action et non-action, et toutes les dualités, quand cessent-elles, et pour qui ? Comprends que ces questions ne viennent pas du savoir. Reste au-delà du désir et du renoncement. ||1||

Heureux celui, mon fils, en qui la simple observation des affaires humaines a mis un terme à son triple désir: la vie, l’amour et le savoir. ||2||

Éphémère est ce monde, affecté par ces trois douleurs, c’est un objet sans valeur qu’il faut abandonner. Quand on a vu cela, on atteint la sérénité. ||3||

Qu’est-ce qu’un temps et qu’est-ce qu’un âge où les dualités n’existent plus pour l’homme ? Quand on renonce à ces dualités, on vit au fil de chaque instant, on peut atteindre alors au terme ultime. ||4||

Diverses sont les pensées des Rishi, des ascètes et des sages. Quel homme, en percevant cette diversité ne dépasse pas le savoir pour atteindre à la sérénité ? ||5||

Quand on a fait le tour des apparences, est-ce que l’on n’est pas un maître au regard de l’esprit, puisqu’on s’est affranchi du mouvement des choses par le détachement que donnent une vision égale et le dépassement du savoir ? ||6||

Vois que les formes des choses ne sont que les choses, et réellement rien d’autre. Alors en un instant libéré de tout lien, tu seras dans ta vraie nature. ||7||

Tout ce qui nous habite n’est que réalité mouvante. N’en retiens aucune parcelle. C’est du renoncement à tout ce qui t’habite que provient le renoncement à la réalité mouvante. N’existe plus alors que l’énergie de l’être. ||8||

Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 9 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 10

mercredi 13 juin 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 8

ASHTAVAKRA  répond à son élève :


VIII  
ASHTAVAKRA : On est prisonnier quand la pensée veut ou pleure, renonce ou prend, bondit de joie ou enrage. ||1||

Mais on est libre quand la pensée ni ne veut ni ne pleure, ni ne renonce, ni ne prend, ni ne bondit de joie, ni n’enrage. ||2||

On est prisonnier quand la pensée s’attache au vécu, mais on est libre quand la pensée se détache de chaque chose perçue. ||3||

Lorsque le moi n’existe pas, on est libre, mais quand le moi existe, on est prisonnier. Quand on comprend cela, c’est véritablement un jeu que de ne pas avoir à renoncer ou à prendre. ||4||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 8 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 9

mercredi 6 juin 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 7

JANATAKA continue :

VII
JANAKA : Mon être est océan sans fin, en lui les sédiments du monde vont et viennent, au gré du vent de leurs propres limites, mais mon être n’en subit pas le poids. ||1||

Mon être est océan sans fin, en lui les vagues de la vie, par leur nature propre, déferlent ou se résorbent, mais pour mon être il n’est ni marée ni reflux. ||2||

Mon être est océan sans fin, en lui existe une fiction qu’on appelle le monde, et c’est avec une sérénité totale, soustrait à toute forme, que mon être l’habite. ||3||

La conscience n’est pas dans les formes, pas plus qu’il n’existe de forme pour la conscience qui est sans fin, que rien n’affecte. Aussi est-ce sans attaches, sans désirs et tranquille, que mon être est présent au monde. ||4||

Mon être n’est que conscience, le monde est un fantasme pour mes sens. Aussi, pour mon être, comment et où existerait l’idée de renoncer et d’avoir ? ||5||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 7 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 8

mercredi 30 mai 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 6

JANAKA répond à son maître lui offrant le fuit de sa méditation :

VI
JANAKA : À l’égal de l’espace, sans limites est mon être, à l’égal d’une jarre, le monde est limité, telle est la connaissance, aussi pour elle s’immerger dans la conscience, ce n’est ni renoncer ni avoir. ||1||

Mon être est océan, les formes en sont les vagues, telle est la connaissance, aussi pour elle s’immerger dans la conscience, ce n’est ni renoncer ni avoir. ||2||

Mon être est une perle, l’univers en est le reflet d’argent, telle est la connaissance, aussi, pour elle, s’immerger dans la conscience, ce n’est ni renoncer ni avoir. ||3||

Dans tout ce qui existe est mon être, et dans mon être est tout ce qui existe, telle est la connaissance, aussi pour elle s’immerger dans la conscience, ce n’est ni renoncer ni avoir. ||4||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 6 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 7

mercredi 23 mai 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 5


ASHTÂVAKRA SAMHITÂ à son élève JANAKA :


V
ASHTAVAKRA : Tu n’as d’attache avec rien au monde. Vierge de toute chose, à quoi veux-tu renoncer ? C’est en brisant l’opacité du corps que tu t’immergeras dans la conscience. ||1||

C’est de toi que naît l’univers comme de l’océan l’écume, telle est l’unité de ton être. C’est en sachant cela que tu t’immergeras dans la conscience. ||2||

L’univers, pourtant visible, ne provient pas d’une réalité, il n’a pas de réalité en toi, que rien n’affecte, il apparaît comme le serpent dans la corde, aussi immerge-toi dans la conscience. ||3||

C’est lorsque souffrance et bien-être seront pour toi égales, car tu es plénitude, lorsque désillusion et espoir seront pour toi égales, égales aussi la vie et la mort, que tu t’immergeras dans la conscience. ||4||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 5 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 6

mercredi 16 mai 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 4


IV
JANAKA : Oh ! oui, celui qui se connaît avec clarté, qui joue parce que les formes sont un jeu, on ne peut pas le comparer aux hommes abusés rouleurs accablés du flot universel. ||1||

L’état que tous les dieux, Indra en tête, se donnent tant de mal à gagner, l’homme éclairé, bien sûr, s’y trouve sans tomber dans l’exaltation. ||2||

Qui connaît cet état n’est pas touché en lui par le bien et le mal, tout comme le ciel, malgré les apparences, n’est pas touché par la fumée. ||3||

Conscience, en vérité, est tout cet univers. L’âme qui sait cela, qui pourrait entraver son action naturelle ? ||4||

Dans le foisonnement de tout ce qui existe, du dieu Brahmâ au modeste brin d’herbe, l’homme éclairé, en vérité, est seul à avoir la capacité de s’affranchir du désir et de son contraire. ||5||

L’être n’est pas duel. Celui qui sait que l’être est le seigneur du monde, ce qu’il sait, il le fait, jamais pour lui la peur n’existe. ||6||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 4 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 5

vendredi 11 mai 2012

Pouvoir de la Dévotion

Gambopa, le plus grand disciple de Milarépa, lui demanda au moment de leur séparation : « Quand le temps sera-t-il venu pour moi de commencer à guider des étudiants ? » Milarépa lui répondit : « Lorsque tu seras différent de ce que tu es maintenant, lorsque ta perception tout entière se sera transformée et que tu seras capable de voir, réellement voir, ce vieil homme devant toi comme rien de moins que le Bouddha lui-même, lorsque la dévotion t'aura amené à cet instant de reconnaissance, ce sera le signe que le temps est venu pour toi d'enseigner. » 

C'est ma dévotion envers mes maîtres qui me donne la force d'enseigner, ainsi que l'ouverture et la réceptivité pour apprendre et continuer à apprendre. Dilgo Khyentsé Rinpoché lui-même ne cessa jamais de recevoir humblement les enseignements d'autres maîtres, souvent même de ceux qui étaient ses propres disciples. Ainsi, la dévotion, qui procure l'inspiration nécessaire pour enseigner, est aussi celle qui donne l'humilité de continuer à apprendre.

Sogyal Rinpoché dans
Le Livre Tibétain de la Vie et de la Mort
Nouvelle édition augmentée, Le Livre de Poche
chapitre 9,
page 272

mercredi 9 mai 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 3

Ayant reçu ses réflexions et le fruit de sa méditation ASHTÂVAKRA SAMHITÂ répond à son élève JANAKA :

III
ASHTAVAKRA : Étranger à la mort est l’être, et lui seul. Si tu perçois cela vraiment, tu te connais avec clarté. Pourquoi ce malin plaisir de céder aux objets ? ||1||

C’est par méprise sur soi-même que l’on fait son miel des objets trompeurs, tout comme on convoite l’argent là où l’on se méprend sur la perle. ||2||

Ce en quoi l’univers tout entier resplendit, comme des vagues sur la mer, c’est l’être. Sachant cela, pourquoi courir, l’âme en peine ? ||3||

Et l’on a beau entendre dire que l’être est toute conscience, d’une beauté surnaturelle, on demeure, plus qu’à tout, attaché au sexe, et l’on succombe alors à tout ce qui affecte. ||4||

Tout à la fois, l’être est dans tout ce qui existe et tout ce qui existe est dans l’être. Aux yeux du sage qui le sait, comme il est singulier qu’on demeure attaché à son moi. ||5||

Tout entier concentré sur l’état non-duel, ou même simplement attaché tout entier à la libération, comme il est singulier qu’on soit encore au pouvoir du désir et qu’on soit délabré par les jeux de l’amour. ||6||

Quand on sait, tout épuisé qu’on est, que le désir est ennemi de la conscience, comme il est singulier qu’on y succombe encore jusqu’à son dernier souffle. ||7||

Quand on est détaché de ce monde ou de l’autre, et qu’on sait discerner le permanent du fugace, comme il est singulier qu’en voulant la libération, on tremble devant elle. ||8||

Mais l’homme éclairé, ou accablé ou comblé, ne percevant, toujours, partout, que son être, n’éprouve ni joie ni chagrin. ||9||

Son propre corps en mouvement, il le perçoit comme le corps d’un autre. Dans la louange et dans le blâme, comment tremblerait-il dans son âme immuable ? ||10||

On perçoit l’univers comme un simple fantasme, quand tout désir a disparu. Si même alors la mort est là, comment frémir de peur avec des pensées claires ? ||11||

Celui dont la pensée est vide de désirs, même à l’égard du non-désir, cette âme magnifique qui tire son bonheur de sa propre conscience, à quoi la comparer ? ||12||

Quand on sait, par sa propre nature, que le visible n’est rien, est-ce que l’on perçoit encore, avec des pensées claires, que ceci est à prendre et cela à laisser ? ||13||

Quand tout désir, en soi, a disparu, qu’on est soustrait à la dualité, qu’il n’y a plus d’attente, tout ce que l’on perçoit au fil de l’existence ne devient jamais un objet ou de joie ou de peine. ||14||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 3 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 4

dimanche 6 mai 2012

IMPERMANENCE ET CHANGEMENT

Il est dit que les dieux vivent dans un faste éblouissant, se délectant de tous les plaisirs imaginables, sans accorder l'ombre d'une pensée à la dimension spirituelle de la vie. En apparence tout se déroule pour le mieux, jusqu'au moment où la mort approche et où commencent à apparaître les signes inattendus du déclin. Alors, les épouses et les bien-aimées des dieux n'osent plus les approcher ; elles se contentent de leur jeter des fleurs de loin, tout en faisant quelques prières distraites afin qu'ils renaissent dans le royaume des dieux. Aucun de leurs souvenirs de bonheur ou de bien-être ne peut les préserver de la souffrance qui les assaille ; ils ne font, au contraire, que la rendre plus cruelle. Leur dernière heure venue, les dieux périssent donc ainsi, seuls et dans la détresse.

Le sort des dieux me rappelle la façon dont sont traités aujourd'hui les malades, les personnes âgées et en fin de vie. Notre société vit dans l'obsession de la jeunesse, du sexe et du pouvoir, et nous fuyons ce qui évoque la vieillesse et la décrépitude. N'est-il pas terrifiant que nous abandonnions ainsi les personnes âgées lorsque leur vie active est terminée et qu'elles ne nous sont plus d'aucune utilité ? N'est-il pas alarmant que nous les mettions à l'écart, dans des maisons de retraite où elles meurent seules et oubliées ? 

Sogyal Rinpoché, dans :
Le Livre Tibétain de la Vie et de la Mort
Nouvelle édition augmentée, Le Livre de Poche
Cf. chapitre 1, page 40





Nous vivons ans un monde en perpétuel changement.

Nous avons la chance de nous affranchir de la réalité relative des karma de souffrances et de nous organiser grâce à l'informatique en communautés de patients qui prennent leurs situations en main grâce à l'entraide comme l'indique le compte rendu de la rencontre du premier anniversaire de Carenity.


si votre navigateur ne vous permet pas de voir la vidéo en entier (cadrage décalé ou tronqué) cliquez sur son titre pour la regarder depuis Youtube. Merci.

L'intermède de cette Vie


Maintenant que le bardo de cette vie se lève pour moi,
J'abandonne la paresse, pour laquelle la vie n'a pas de temps,
J'aborde sans distraction le chemin de l'écoute et de l'entente,
de la réflexion et de la contemplation, et de la méditation,

Faisant des perceptions et de l'esprit le chemin, je réalise les « trois kayas », l'esprit d'éveil
.

Maintenant que j'ai obtenu un corps humain,
L'esprit n'a plus le temps d'errer sur le chemin.
PADMASAMBHAVA.
Cf. Le Livre Tibétain de la Vie et de la Mort
Nouvelle édition augmentée, Le Livre de Poche
chapitre 8, page 227


Reconnaissez sans cesse le caractère onirique de la vie et réduisez attachement et aversion. Cultivez la bienveillance envers tous les êtres. Soyez emplis d'amour et de compassion, quelle que soit l'attitude des autres envers vous. Ce qu'ils vous font aura une moindre importance si vous le voyez comme un rêve. La clé est de conserver une intention positive durant le rêve. C'est là le point essentiel, la spiritualité authentique. »

CHAGDUD TULKU RINPOCHÉ 
Cf. Le Livre Tibétain de la Vie et de la Mort
Nouvelle édition augmentée
, Le Livre de Poche

Cf. chapitre 3, page 92

jeudi 3 mai 2012

La communication bienveillante est non-violente

Une communication bienveillante est une action juste née d'une attitude non-violente selon la motivation de sagesse-compassion qui la soutend, y mêler toute égoïté ne convient donc pas.
"Donner avec bienveillance bénéficie autant à celui qui donne qu'à celui qui reçoit, cependant c'est toujours celui qui donne qui reçoit surement 100% du bénéfice réel"
Notez que la "communication bienveillante" est un processus de communication et non d’une doctrine confessionnelle. Ce moyen de communiquer n’est pas dicté par la culpabilité, la peur, la honte ou le désir d’être payé en retour.  

Sa seule intention doit être de contribuer au bien-être universel.

Car il existe un langage et des interactions qui interfèrent nocivement avec notre capacité à donner avec bienveillance. On pourrait parler de "communication détonateur" car elle "détone" d'avec la réalité, la bonté primordiale.

Heureusement, il existe donc aussi le langage et les interactions qui renforcent notre aptitude à donner avec bienveillance et à inspirer aux autres le désir d’en faire autant. C’est la "communication non violente".


La communication détonateur
est un karma (acte et ses conséquences) négatif qui vrille nos canaux subtils latéraux et qui, ainsi, entrave notre circulation de bodhicitta dans le canal central, voyez donc comment :

La critique
Une des formes de communication détonateur est la critique impliquant que l’autre a tort ou qu’il est mauvais. 

Par exemple : "Ton problème, c’est que tu es….". Ce type de critique comprend les insultes, le reproche, le dénigrement, les diagnostics et les jugements. Il sous-entend toujours un "tu devrais" : la cible de la critique ne "devrait pas" être telle qu’elle est.

Le déni de responsabilité
Un deuxième type de communication détonateur contient des termes qui nient que l’on a le choix ou qui impliquent que le sujet n’est pas responsable de ses pensées, sentiments et actions, tels que les mots "devoir" ou "falloir" dans des phrases comme : "Il y a des choses que tu dois faire, qu’elles te plaisent ou non.".

Nous refusons la responsabilité de nos actes quand nous en attribuons la cause :
  • Aux actions des autres (J’ai refusé de participer parce qu’il ne m’a pas demandé mon avis)
  • A de vagues forces impersonnelles (Je l’ai critiqué parce qu’il fallait que quelqu’un le fasse).
  • A nos antécédents psychologiques, notre état, un diagnostic ou à notre passé (je fume parce que je suis anxieux).
  • Aux diktats d’une autorité (J’ai menti au client parce que le patron m’a dit de le faire).
  • A la pression du groupe (J’ai bu parce que tout le monde buvait).
  • A une politique institutionnelle, des lois ou des règlements (Je mets des notes strictes à mes élèves parce que c’est la politique de l’établissement).
  • Au rôle attribué à un sexe, à un âge ou à une catégorie sociale (Je déteste aller au travail, mais j’y vais parce que je suis marié et père de famille).
  • A des pulsions incontrôlables (J’ai mangé ces chocolats parce que c’était plus fort que moi).
Les exigences
Elles constituent une troisième forme de communication détonateur. Ce mot "exigence" est employé pour désigner la demande ou requête qui, implicitement ou explicitement, fait planer sur celui auquel elle s’adresse la menace d’un blâme ou d’une punition au cas où il n’obtempérerait pas.

Les déclarations indiquant qui mérite une récompense ou une punition
Un langage associé au concept que certaines actions méritent récompense et certaines autres une punition. 
Exemple : "Il mérite d’être puni pour ce qu’il a fait".


La communication non violente
est un karma (acte et ses conséquences) positif qui  libère nos canaux subtils latéraux et favorise la  circulation de notre bodhicitta, voyez donc comment : 

Ce principe de communication focalise notre attention sur quatre points clefs :

1. Ce qui se passe en moi (ma responsabilité)
  • Ce que j’observe (imagine, me rappelle) qui contribue (ou non) à mon bien-être ;
  • Ce que je ressens en relation avec ce que j’observe ;
  • L’énergie vitale (besoins, aspirations, souhaits, valeurs) qui génère mes sentiments.

2. Ce que je demande pour me rendre la vie plus belle (mes besoins, mes désirs)
  • indépendant de ma volonté présente (résultat de mon karma passé en interaction avec celui d'autrui) ;
  • dépendant de ma volonté présente (mon choix responsable présent).

3. Ce qui se passe en l’autre (sa responsabilité)
  • Ce que l’autre observe (imagine, me rappelle) qui contribue (ou non) à son bien-être ;
  • Ce que l’autre ressent en relation avec ce que j’observe ;
  • La force vitale (besoins, aspirations, souhaits, valeurs) qui génère ses sentiments.

4. Ce que l’autre demande pour se rendre la vie plus belle (ses besoins, ses désirs)
Une des composantes de la communication non violente consiste à faire une observation précise de ce qui augmente ou diminue notre bien-être commun.

Cependant, il est important d’éviter de mêler des évaluations et des jugements à la description des faits. 
  • Une observation décrit une chose que nous voyons, entendons ou touchons (notre point de vue objectif). 
  • Une évaluation formule des déductions tirées de nos observations (notre point de vue subjectif). 
Quand nous mélangeons l’observation d’un comportement et le jugement que nous portons sur lui, notre interlocuteur aura tendance à investir son énergie dans l’autodéfense et la contre-attaque plutôt que dans une compréhension bienveillante de ce que nous vivons. 

Ce qui ne signifie pas que la communication non violente exige que nous soyons parfaitement objectifs et que nous nous abstenions de juger les actes d’autrui, mais que nous séparions bien nos observations de nos évaluations.

Quand le comportement d'autrui nous déplait et que nous désirons l'influencer pour qu’il le modifie, ou que nous approuvons son comportement et désirons-lui faire part de notre appréciation, nous avons intérêt à énoncer clairement ce à quoi nous réagissons sans y mêler aucune évaluation

Car la confusion des deux éléments entraine souvent des interprétations erronées et une attitude défensive.

Séparer les observations des évaluations nous aide également à penser et à parler de façon dynamique plutôt que statique. Nous nous créons beaucoup de problèmes en employant un langage statique pour faire face à un monde en perpétuel changement.

Ce type de communiquation quotidienne ne peut avoir lieu que dans un contexte relatif, qui ne tient pas tout à fait compte de la réalité de l'interdépendance et de la non séparation sujet-objet-action de donner ou communiquer. L'attitude bouddhique intègre l'échange de soi-même avec autrui, et la considération d'autrui comme plus important que soi-même, cela dans un grand discernement afin de ne pas entraver notre capacité de bienveillance et d'aide effective. Il n'est pas nécessaire d'être systématiquement dans l'action ou cette communication.

Car pour tout dire de la réalité culturelle et historique actuelle, notre réalité relative, voici une citation de Wendell JOHNSON dans «Vivre avec le changement» 1972 :
"Notre langage est un instrument imparfait, élaboré par nos ancêtres ignorants. C’est un langage animiste qui invite à parler de stabilité et de constantes, de similitudes, de normalité et de catégories, de transformations magiques, de remèdes instantanés, de problèmes simples et de solutions définitives. Mais le monde que nous essayons de symboliser avec ce langage est un univers de processus, de changement, de différences, de dimensions, de fonctions, de rapports, de croissance, d’interactions, de développement, d’apprentissage, de gestion, de complexité. Et cette non-correspondance entre notre monde en perpétuel changement et notre langage relativement statique fait partie de notre problème."

Aussi, la révolution du silence (Cf. Krisnamurti) quand mes besoins sont incompatibles avec les attentes d'autrui, reste un refuge sûr pour conserver nos énergies communes

En effet, le silence est d'or, car il permet aux consciences de s'élever, quand seront mortes les pensées. Mais il y a silences et Silence, sons et Son, lumières et Lumière :

Guérir par les mantras
(comment et pourquoi ça marche)

Mais, pour qui ne renonce ni aux pensées, ni aux dogmes, ni aux concepts, ni à soi-même, la plus grande bienveillance prendra des milliards de kalpas pour aboutir au bienfait complet universel. En effet, le bonheur est entre nos mains, à condition de savoir les ouvrir. 
Aussi pour conclure, la communication bienveillante consiste à ouvrir nos oreilles, tous nos sens communicatifs et donc notre coeur en suivant ces conseils de Sogyal Rinpoché :

Ecouter est un processus bien plus difficile que la plupart des gens ne l'imaginent. Ecouter réellement, au sens où les maîtres le comprennent, signifie nous abandonner complètement, oublier toutes les connaissances, les concepts, idées et préjugés dont notre tête est remplie. Si vous écoutez réellement les enseignements, les concepts qui constituent notre véritable obstacle - cela même qui nous sépare de notre vraie nature - s'effaceront lentement et sûrement.

Pour aller plus loin :
Le Livre Tibétain de la Vie et de la Mort
Nouvelle édition augmentée
, Le Livre de Poche
Cf. chapitre 8
, page 238


mercredi 2 mai 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 2

JANAKA inspiré par les paroles de son maître ASHTÂVAKRA SAMHITÂ lui indique le fuit de sa méditation :

II
JANAKA : Rien ne m’affecte, je suis sérénité, conscience, au-delà des formes vivantes. Si long le temps où j’ai été dupé par le voile des formes. ||1||

Moi seul rends visibles et mon corps et le monde. Pour moi, le monde est à la fois et toute chose et rien. ||2||

C’est en mourant à mon corps et au monde qu’aussitôt un étrange pouvoir me fait apercevoir la suprême conscience. ||3||

Vagues, écume ou tourbillons, tout est lié à l’eau. Ainsi de l’univers : émané de soi-même, il est lié à soi. ||4||

Un vêtement, quand on l’observe, n’est formé que de fil. Ainsi de l’univers, quand on l’observe : il n’est tissé que de soi-même. ||5||

Le jus du sucre de canne imprègne tout entier le sucre qu’il produit. Ainsi de l’univers : produit en moi, il est tout imprégné de moi. ||6||

C’est de son ignorance propre que naît le monde, mais se connaître le dissipe. Ne pas reconnaître la corde fait apparaître un serpent, qui disparaît quand on l’a reconnue. ||7||

La vraie forme est lumière, je ne suis rien d’autre qu’elle. Et lorsqu’apparaît l’univers, c’est moi qui suis visible. ||8||

Mais l’univers fictif, l’ignorance en moi le fait surgir, comme l’argent paraît dans la perle, le serpent dans la corde, et l’eau dans le rayon de soleil. ||9||

Cet univers surgi de moi, en moi se résorbera comme la jarre dans l’argile, la vague dans la mer et le bracelet dans l’or. ||10||

L’être ! Je salue en moi l’être, pour qui nulle mort n’existe, qui, lorsque périt le monde dans sa totalité, du brin d’herbe à Brahmâ, seul demeure. ||11||

L’être ! Je salue en moi l’être, l’être qui est unique, même s’il a un corps. Nulle part il ne va, de nulle part il vient, mais sans cesse il emplit l’univers. ||12||

L’être ! Je salue en moi l’être, l’être ici-bas inégalé par rien, cet être qui soutient de tout temps l’univers, sans le contact du corps. ||13||

L’être ! Je salue en moi l’être, l’être qui ne possède rien, cet être pour qui tout ce qui, en ce monde, est parole, est nourriture pour l’esprit. ||14||

La connaissance, le connu, le connaisseur n’ont pas d’existence réelle. L’ignorance les fait surgir tous trois dans l’être que rien n’affecte. ||15||

La racine du mal est la dualité. Il n’est d’autre remède que de savoir que tout objet perçu est illusoire et que seul l’être a la saveur de la pure conscience. ||16||

L’être est toute conscience. Mon ignorance en a construit une réplique. Même ainsi reflété, l’être est absent de toute image. ||17||

Pour l’être n’existent ni délivrance ni prison. Dépourvue de support, enfin l’illusion cesse. L’univers est dans l’être, sans pourtant matériellement s’y trouver. ||18||

L’univers et le corps ne sont rien, c’est l’évidence. L’être est pure conscience, sur quoi donc désormais divaguer ? ||19||

Corps, ciel et enfer, prison et liberté, et peur aussi, cela n’est que fiction en vérité. Pour l’être qui est conscience, qu’y a-t-il donc à accomplir ? ||20||

Même dans une foule immense, pour l’être qui perçoit, inexistante est la dualité, qui semble alors une forêt. À quoi pourrait s’arrêter l’être ? ||21||

L’être n’est pas le corps, le corps n’appartient pas à l’être. Je ne suis pas celui qui vit, je ne suis que conscience. ||22||

En moi qui suis insondable océan, quand le vent de la pensée souffle, il se produit aussitôt des vagues d’univers. ||23||

En moi qui suis insondable océan, quand le vent de la pensée cesse, les fondements de l’univers périssent, et sans pitié pour qui spécule. ||24||

En moi qui suis insondable océan, les vagues de la vie naissent et se heurtent, s’ébattent et se résorbent, par leur nature propre. ||25||


Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 2 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 3

mardi 1 mai 2012

1er Mai 2012



Bon  Premier Mai
Fête du travail et

  Jour de Gourou Rinpoché



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ཀརྨ་བདེ་ཆེན་ལྷ་མོནས
Pour ceux qui ont pris Refuge et ont la dévotion inébranlable,
Sur les terres bien établies de l'Équanimité toute inclusive,
Arrosées par l'eau douce de l'Amour incomparable
Poussent les fleurs de la Compassion intrépide
Abritées par la forêt rafraîchissante de la Joie
Ainsi ils peuvent contribuer au bien des êtres sensibles.
http://karmadetchen.blogspot.com/

dimanche 29 avril 2012

2012 Eveillé !


Été avec  Chögyal Namkhaï Norbu Rinpoché

Il n'y a jamais de distance ni de temps ni d'espace avec nos précieux maîtres

Impossible de les rejoindre ni de participer aux ébats du sangha ?

Qu'importe ! les précieux maîtres sont dans l'espace de notre cœur, notre force vitale, quoi qu'il arrive le maître précieux est en notre état pur inaltéré, notre propre éveil.

Les circonstances sont leur enseignement, nous y puisons toute Sagesse Amour et Compassion.

Si nous n'en sommes pas encore arrivés là, cela peut s'apprendre dans des lieux consacrés qui reçoivent ces précieux maîtres comme le temple de Lérab Ling, si proche et que paradoxalement je ne connais pas extérieurement, bien qu'y faisant ma retraite chez-soi. 


En effet, comme je le dis plus haut : pas de distance avec le précieux maître du moment qu'on en intègre l'enseignement et qu'ainsi nous reconnaissons notre véritable nature et notre place naturelle en ce monde et au-delà.

Pas de contradiction entre ces deux vidéo, rester figés sur les apparences nous fait toujours passer à côté de la réalité. 

En effet, comme le dit Pramahansa Nithyanada il y a 101 façons de vivre l'Eveil, qu'il nomme "illumination". Chaque maître ayant son propre vocabulaire, pour exprimer les mêmes choses, il est important d'en suivre un jusqu'au bout pour réaliser son enseignement, et comprendre tous l'univers et tous les maîtres qui ne font alors plus qu'un : votre propre nature éveillée.

Voici une vidéo présentant ces 101 réponses à comment vivre l'illumination ou la Grande Paix Naturelle (sinon l'éveil):

sarvamangalam!

mercredi 25 avril 2012

Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 1

ASHTÂVAKRA SAMHITÂ


I
JANAKA : Comment s’obtient la connaissance ? Comment se produira la délivrance ? Et l’absence de toute passion, comment s’obtient-elle ? Maître, dis-le moi. ||1||

ASHTAVAKRA : Tu veux te libérer, mon fils ? Renonce aux objets, c’est un poison. Patience, droiture et compassion, joie, vérité, c’est le nectar qu’il faut goûter. ||2||

Terre, eau, feu, air, éther, tu n’es rien de cela. Tu en es le témoin, la forme de ton être est conscience, sache-le pour ta libération. ||3||

Mets de côté ton corps pour demeurer dans la conscience. Tu trouveras aussitôt équilibre et sérénité, tu seras délivré de tout lien. ||4||

Tu n’es d’aucune caste, ni d’aucun rang social, tu n’es pas un objet pour les sens. Tu n’as ni attache ni forme. Témoin de toute chose, ta nature est tranquillité. ||5||

Le juste et l’injuste, ô roi, tout comme plaisir et souffrance, sont des concepts. Tu n’es ni agent ni sujet. Libéré, en vérité tu l’es toujours. ||6||

Unique observateur de toute chose, libéré, tu l’es réellement toujours. Ce qui t’enchaîne, c’est que tu vois le témoin comme un autre toi-même. ||7||

« Je suis l’agent », dis-tu, parce que tu t’imagines être quelqu’un, et tu es mordu par ce grand serpent noir. « Je ne suis pas l’agent », voilà ce qui fait respirer. Bois ce nectar, ta nature est tranquillité. ||8||

« Je ne suis que pure conscience », cette évidence est un feu qui peut consumer le gouffre du non-savoir. Toute douleur évanouie, ne sois que tranquillité. ||9||

Ce en quoi surgit l’univers – est-ce un serpent, est-ce une corde ? dit l’imagination –, c’est la conscience, joie de toutes les joies. Ne sois que tranquillité. ||10||

Celui qui se croit délivré l’est en effet, et enchaîné, celui qui pense l’être. Il dit vrai le dicton qui court ici-bas: toute pensée est une voie. ||11||

L’être est témoin, présence universelle, plénitude. Lui seul est délivré, et lui seul est conscience, lui seul est au-delà de toute activité. Sans désirs, sans attaches, il est toute sérénité. C’est par erreur qu’on le perçoit soumis aux mouvements des choses. ||12||

Conçois ton être comme immuable, comme conscience soustraite à la dualité. Renonce à l’illusion de te croire un reflet, renonce à un état qui serait intérieur et externe. ||13||

S’imaginer être le corps est une chaîne, cela fait très longtemps, mon fils, que tu en es l’esclave. « Je suis toute conscience », cette connaissance est une arme qui peut briser la chaîne : ta nature est tranquillité. ||14||

Tu es sans attache, au-delà de l’action, tu es toute lumière, rien ne peut t’affecter. Voici ce qui t’enchaîne : tu t’obstines à chercher l’unité. ||15||

Tout cet univers que tu vois est imprégné de toi, en toi il se déploie réellement. Ta vraie nature est conscience et limpidité, ne sombre pas dans la faiblesse des pensées. ||16||

Tu es sans désirs et sans forme, rien ne pèse sur toi, tu es sérénité. Ta clairvoyance est sans limites, car tu n’es plus troublé par la pensée. Que la conscience soit ta seule demeure. ||17||

Riche de formes est le mensonge, vide de formes est l’immuable, sache-le. Et voir cela met un terme à toute forme de genèse. ||18||

De même que l’on est tout à la fois dedans et au dehors de l’image que le miroir reflète, de même le Seigneur suprême est à la fois dans le corps et alentour. ||19||

De même que l’espace est tout à la fois un et partout répandu, autour et dans la jarre, de même la Conscience, sans âge et sans limites, est dans l’immensité de tout ce qui existe. ||20||

Ainsi ont été prononcées
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 1 -
d'
ASHTÂVAKRA SAMHITÂ avec son élève JANAKA

à la semaine prochaine pour
Les Paroles du Huit Fois Difforme - acte 2

dimanche 22 avril 2012

PAROLES DU HUIT-FOIS-DIFFORME

ASHTÂVAKRA SAMHIT 
Présentation par Alain Porte :


Les deux interlocuteurs en présence dans l’Ashtâvakra Samhitâ (Les paroles du Huit-Fois-Difforme) sont le roi Janaka, fréquent patronyme de souverains illustres, et le jeune adolescent Ashtâvakra, le Huit-fois-difforme.

Dans ce tête-à-tête, où le premier, loin des fastes de sa Cour, cherche auprès du second réponse à des questions essentielles, surgissent des sujets familiers à la tradition indienne : la Connaissance, la Libération, l’émancipation du Désir.

 
Ce dialogue n’est pas une convention littéraire destinée à structurer un enseignement pour le transmettre. Il n’y a pas de dramaturgie particulière qui régirait deux personnages affectés de deux destins singuliers. Il n’y a pas de mise en scène qui manipulerait l’épiphanie progressive de la Vérité, avec en guise de point d’orgue, le coup de théâtre ultime de la Révélation.

« La forme de ton être est conscience », affirme Ashtâvakra, dès le troisième shloka (verset)  du premier chapitre.

L’échange entre les deux protagonistes, entre le jeune Maître d’un jour et son prestigieux Disciple, cet échange est une plongée dans l’océan de l’Être. Toute argutie dialectique est donc par là même noyée dans un espace intérieur sans limites, d’où les paroles émergent comme des vagues surgies de la conscience pour s’y résorber aussitôt.

 
Ce dialogue est un texte classique du monisme védantique. Sa date de composition est inconnue. On conjecture, non sans vraisemblance, qu’il se situe entre le IVe et le VIIe siècle de notre ère.
 
 
Les lecteurs de la littérature sanskrite ont fort à propos noté que les deux personnages du roi Janaka et du précoce Ashtâvakra figuraient dans l’épopée du Mahâbhârata, « La Grande Histoire du Monde » dans la culture indienne, dont la rédaction se situerait entre le IVe siècle avant notre ère et le IVe siècle après notre ère. C’est pourquoi il nous a semblé utile de traduire cet extrait en ouverture du volume.


Dans le VanaparvanLa Forêt »), la troisième des dix-huit parties que comporte le poème, un récit nous apprend l’essentiel de l’enfance d’Ashtâvakra et de sa rencontre avec le roi Janaka. 
À la suite d’une malheureuse partie de dés perdue par le Pândava Yudhishthira, lui-même, ses quatre frères (Arjuna, Bhîma, Nakula et Sahadeva) ainsi que leur épouse commune, Draupadî, ont été condamnés à un exil de douze ans dans la forêt. Cette longue pénitence dans les bois donne lieu à maintes péripéties secondaires, à des rencontres avec des anachorètes. L’un d’entre eux, Lomasha, explique à Yudhishthira pourquoi la rivière qui coule à leurs pieds a reçu le nom de Samangâ : L’intégrité-de-ses-membres. Elle avait jadis été le lieu d’un prodige.


C’est dans cette eau miraculeuse, en effet, que Kahoda, le père de Huit-fois-difforme (Ashtâvakra), avait prié son fils de s’immerger pour abolir la malédiction qu’il avait lancée contre son enfant de neuf mois, alors encore dans le ventre de sa mère, et qui l’avait fait naître estropié, huit-fois-difforme. C’est en se baignant dans l’eau de la rivière, qui fut nommée pour cela : Samangâ, qu’Ashtâvakra avait recouvré toute sa stature, la pleine intégrité de son corps.


Demeure une question :
pourquoi
difforme huit fois ?

 

La pensée indienne aime à semer en toute chose de petites lumières de sens, comme si tout ce qui était confié au fleuve de la vie méritait une parcelle de flamme, pour être à l’unisson de ce qu’est le cosmos, à travers l’image de Shiva Natarâjâ (Shiva, le roi-des-danseurs), c’est-à-dire, une danse de feu.
 

Il nous est revenu à l’esprit une parole du dieu Krishna à l’adresse de son ami Arjuna (Bhagavad-Gîtâ, VII, 4-5) : «Terre, Eau, Feu, Air, Éther, Pensée, Conscience et sens du Moi, telles sont les huit divisions de ma Nature.»
Affirmation aussitôt suivie par : «Elle est manifestée, mais sache que je possède une autre nature, non manifestée, incarnée dans l’être vivant : c’est elle qui soutient le monde.»

 
À la lumière du jeune Ashtâvakra, le huit-fois-difforme, physiquement affligé de déformations à quelques jours à peine de sa naissance dans le monde des hommes, on pourrait dire que naître, s’incarner dans un corps, serait déjà comme être «défiguré» par les apparences, divisé, morcelé, et donc intrinsèquement dés-uni.

Là où Krishna se contente d’énoncer les composants de toute nature humaine, sans l’assortir d’un jugement, Ashtâvakra ajouterait l’éclat d’un presque-sarcasme : posséder une forme, c’est déjà être difforme, c’est naufrager dans la dualité consubstantielle à la nature du monde, c’est, dès l’origine, une désintégration. Telle est la vie. Or, comme on le sait, le berceau des formes manifestées, c’est l’Être, l’Un sans second, cette «autre nature, non manifestée, incarnée dans l’être vivant» qu’évoque Krishna. Cette nature est sans commencement ni fin ; la pensée ne peut la concevoir ; la parole ne peut l’exprimer. Elle est immuable, au-delà de l’espace et du temps.

Ainsi pourraient se rejoindre la fable du Mahâbhârata et la «métaphysique» de la Bhagavad-Gîtâ. Ce ne serait pas contradictoire avec l’esprit d’analogie intarissable qui anime la conscience indienne.  

L’eau de la Conscience Une permettrait la réconciliation de toutes les parties de «l’âme», tout comme la rivière Samangâ, L’intégrité-de-ses-membres, avait rendu au corps déformé d’Ashtâvakra sa perfection naturelle.


A. P.
 

Il existe de très nombreuses éditions de l’Ashtâvakra Samhitâ. Nous nous sommes basés sur celle éditée par le Swami Nityaswarûpânanda, publiée par l’Advaita Ashrama, Calcutta, quatrième édition, Avril 1975.
SOURCE : http://www.lyber-eclat.net/lyber/samhita/paroles.html

À PARTIR DE MERCREDI, JE VOUS PRÉSENTERAI CETTE TRADUCTION, ACTE PAR ACTE (SOIT ICI DURANT 20 MERCREDIS), MÊME S'IL NE S'AGIT PAS D'UNE DRAMATURGIE, À PARTIR DESQUELS NOUS POURRONS ÉCHANGER ET FAIRE LE LIEN AVEC LA PRAJNAPARAMITA ET AUTRES ENSEIGNEMENTS BOUDDHIQUES QUI ONT SUCCÉDÉ, DES VUES DE LA TRADITION  BOUDDHIQUE INDO-TIBETAINE, CAR AMENÉE AU TIBET PAR PADMASAMBHAVA, LE PRÉCIEUX MAÎTRE NÉ DU LOTUS, DANS LE LAC DANAKOSHA EN INDE, DEVENU GOUROU RINPOCHE AU TIBET OÙ IL A LAISSÉ DE NOMBREUX DISCIPLES DONT LA DÉTENTRICE PRINCIPALE DE SA LIGNÉE QU'EST YESHÉ TSOYAL. D'où l'importance à mon humble sens de vous présenter ce texte, doublement évocateur, lorsqu'il s'agit, avec la SEP comme support ou moyen habile, de reconnaître ce Huit Fois Difforme et de le relier au cheminement de réalisation de l’Éveil amené par Padmasambavha à ses 25 disciples tibétains et tous les maître et étudiants à leur suite, dont votre humble servante autant qu'elle puisse s'en montrer digne. 

Puissiez vous tous être bien, puissiez vous tous être heureux, quelles que soient les circonstances.

ACTE 1 DES PAROLES DU HUIT FOIS DIFFORME