Auteur : ARSEP | 45 visites | En ligne : 13 septembre 2012
Les symptômes, la prise en charge, un centre de référence au Kremlin Bicêtre... retrouvez ces informations sur le site de la Fondation ARSEP
information relayée par le site de l'AFP (écoute info SEP)/
« Bien que la sclérose en plaques (SEP) de l'enfant soit beaucoup plus rare que celle de l'adulte (2 à 4% des SEP commencent avant l'âge de 16 ans, 0.5% avant 10 ans), elle peut être diagnostiquée dès les premières années de la vie. Même si elle a été observée chez des enfants de 2 ans, l'âge moyen de début est de 11-12 ans. Toutefois, 14% des enfants débutent la maladie avant 6 ans et 30% avant 10 ans (...) »
Centre de référence national - des maladies Neuro-inflammatoires de l'enfant
CHU de Bicêtre - Serv. neuropédiatrie du Pr. Marc Tardieu
78, Av du Général Leclerc
94275 Le Kremlin Bicêtre Cedex
Dr Kumaran DEIVA
La Sclérose en Plaques de l’enfant
La sclérose en
plaques (SEP), maladie neuro-inflammatoire touchant la substance
blanche, atteint aussi bien les adultes que les enfants. Il s’agit d’une
maladie rare chez l’enfant mais qui peut donner un handicap sévère. De
nouvelles thérapies sont actuellement accessibles aux enfants atteints
de cette maladie
.
Définition
> SEP, une maladie neuro-inflammatoire
Il existe dans notre corps des cellules qui
nous protègent contre les agents infectieux ou autres qui peuvent nous
nuire. Ces cellules sont essentiellement constituées par les lymphocytes
T et B. Ces dernières lorsqu’elles sont activées par ces agents
pathogènes vont par une réaction en chaîne activées d’autres cellules
tout en produisant des substances tels les cytokines les chimiokines :
c’est ce que l’on appelle l’inflammation. Le but final de cette réaction
est de détruire l’agent pathogène responsable de cette activation et
parallèlement à cela, vont se mettre en place des systèmes de contrôle
qui vont arrêter cette inflammation et ceci va dépendre du type de
cytokine et de chimiokines sécrétés.
Dans la SEP, une inflammation se met en place pour une raison
encore inconnue. Les cellules qui doivent nous protéger vont s’activer
et s’attaquer contre notre propre corps, et plus particulièrement contre
la myéline qu’il considère comme agent pathogène. C’est cette
destruction qui va conduire aux symptômes de la SEP.
> La myeline
Le système nerveux central est composé de
neurones qui nous permettent de réaliser les gestes de la vie courante,
de sentir la douleur, le sol quand on marche. Ces neurones afin de
transmettre les informations à une vitesse extrêmement importante vont
être entourés d’une gaine discontinue que l’on appelle la gaine de la
myéline. Cette gaine provient d’une cellule qui est présente dans le SNC
que l’on appelle les oligodendrocytes. La survenue de destruction de la
gaine de la myéline entraîne les symptômes diverses dont se plaignent
les enfants. Ces symptômes sont la plupart transitoires de l’ordre de
quelques jours et parfois elles peuvent être permanentes entrainant un
handicap.
La SEP est une maladie
multifactorielle, c'est-à-dire que plusieurs causes peuvent être
associés et être responsable de la symptomatologie. Parmi ces facteurs,
on peut incriminer la génétique, les infections virales, et
l’envrionnement.
> Les facteurs génétiques
Des antécédents familiaux de SEP ont été
rapportés chez 6 à 8% des patients ayant une SEP de l’enfance. Les
membres de famille des sujets atteints ont des risques plus importants
de développer la maladie que la population générale. Les demi-frères ou
sœurs des enfants atteints ont la moitié du risque des vrais frères et
sœurs de développer la maladie alors que les frères et sœurs adoptés ont
le même risque que celui de la population générale. Ces résultats
suggèrent que les facteurs génétiques interviennent de façon certaine
dans le risque individuel de la survenue de la maladie. Le niveau de
concordance est supérieur pour les jumeaux monozygotes (~30%) que pour
les jumeaux dizygotes (~5%), mais reste bien inférieur à 100%, indiquant
que la génétique seule ne peut expliquer la survenue de la maladie.
> Les facteurs infectieux
La survenue d’un épisode infectieux
précédent la maladie ou un facteur saisonnier n’a été rapporté que chez
29% des enfants et à l’heure actuelle, aucun agent pathogène n’a été
incriminé dans la survenue de cette pathologie. Longtemps, certains
virus tel l’EBV, l’herpes, rubéole, le VZV, la rougeole, les oreillons
ou des bactéries tel le mycoplasme ont été suspectés mais sans preuve
véritable.
> La vaccination
Nombreuses études ont évalué la possibilité
d’une association entre l’augmentation de la survenue d’une SEP
secondaire chez l’adulte et l’immunisation par le vaccin recombinant de
l’hépatite B (HB). La plupart n’ont montré aucune augmentation
significative de l’incidence de la SEP à court (dans les 2 premiers
mois) ou long (>1 an) terme après la vaccination dans les études de
cohorte ou de cas-contrôles. Cependant, certaines études chez les
adultes ont rapporté une augmentation significative du risque de SEP
dans les 3 ans après la vaccination, suggérant que des périodes de
risque prolongés doivent être évaluées. Les récentes études réalisées
dans notre centre ont montré que la vaccination contre l’hépatite B
après un premier épisode de démyélinisation dans l’enfance n’augmente
pas le risque d’évolution vers une SEP et ne semble pas augmenter le
risque de survenue d’un premier épisode de SEP dans l’enfance.
> Le tabagisme passif
La possibilité d’un lien entre le tabagisme
actif et la survenue d’une SEP secondaire a été soulevée chez les
adultes et il a été démontré que les enfants exposés au tabagisme
parental ont un risque plus élevé d’avoir une SEP, ce risque étant
dépendant de la durée d’exposition.
Epidémiologie
La SEP touche entre 2,7% et 10 % des
enfants de moins de 16 ans et entre 0,2% et 0,7% des enfants de moins de
10 ans. Dans la cohorte française, 30% d’enfants présentant une SEP,
avait moins de 10 ans. L’âge moyen des enfants ayant une sclérose en
plaques est de 12 ans et la répartition du sexe dépend de l’âge de
survenue de la maladie. En effet, autant de fille et garçon sont touchés
si l’âge de survenue est de moins de 10 ans, alors que au-delà de 10
ans, la majorité des enfants atteints est de sexe féminin.
Clinique
La SEP est une maladie évoluant par poussée,
c'est-à-dire des symptômes cliniques apparaissent puis disparaissent.
Par ailleurs, la SEP est une atteinte disséminée dans l’espace,
c'est-à-dire plusieurs régions du cerveau peuvent être atteints en
même temps : un même enfant peut avoir des troubles de l’équilibre
(atteinte des voies sensitives profondes), des troubles de la motricité
(atteintes des faisceaux moteurs) et des troubles visuelles. Ces
atteintes peuvent survenir à plusieurs reprises avec parfois des
variations sur le plan des atteintes cliniques confirmant ainsi la
dissémination dans le temps. Il existe des formes particulières de la
SEP, la plus fréquente étant l’atteinte des voies longues qui se traduit
par des troubles de l’équilibre, des troubles de la sensibilité.
Cas particuliers
> Névrite Optique
L’atteinte des nerfs optiques est fréquente dans la SEP et se traduit
le plus souvent par une Névrite Optique Rétrobulbaire (NORB). Cette
dernière se caractérise par une baisse brutale de l’acuité visuelle avec
douleurs à la mobilisation des yeux. L’atteinte de oculaire est
majoritairement monoculaire dans la SEP et dans la cohorte Kidsep, 35%
des enfants présentaient une NORB. Le fond d’œil est normal sauf dans
certains cas où une papillite est associée se traduisant par un œdème
papillaire.
> Myélite
Il s’agit d’une atteinte de la moelle épinière qui permet la
conduction des informations ascendantes et descendantes. Les symptômes
se traduisent par un déficit de la force aux membres inferieurs et
parfois aux membres supérieurs en fonction du niveau de l’atteinte,
associé à des troubles de la sensibilité et des troubles de la miction
et de l’exonération. Selon les études, la myélite est présente entre 1% à
31% des enfants souffrant de SEP. Dans la cohorte française, 7% des
enfants ont présenté des symptômes de myélite transverse et des lésions
médullaires étaient présentes chez 18% des enfants lors de la première
poussée.
> Rhombencéphalite
Elle se caractérise par de signes d’atteintes du tronc cérébral : des
troubles respiratoires, de déglutition, troubles phonatoires, sont
parfois associés à des hocquets ou des atteintes des muscles de la face
(atteinte du VII), des troubles auditives (atteinte du VIII) ou de la
sensibilité de la face (atteinte du V). C’est une des caractéristiques
de la SEP de l’enfant.
> Encéphalomyélite aigue disséminée (EMAD)
Il s’agit d’une manifestation qui s’exprime par plusieurs symptômes
soit motrice, sensitive, une rhombencéphalite et/ou myélite. Cette
atteinte est surtout caractérisée par un trouble de la conscience
sévère. Quinze pour cent des enfants ayant une SEP ont présenté comme
manifestation initiale une EMAD dans la série française, et parmi ces
enfants 36% avaient moins de 10 ans. Cette manifestation est aussi une
autre des particularités de la SEP de l’enfant.
Forme clinique
La majorité des formes cliniques chez l’enfant sont de type
rémittente. Elle se manifeste par la survenue de symptômes cliniques qui
régressent sans laisser de séquelles alors que dans la forme
progressive, un handicap peut se manifester et s’aggraver avec le temps.
Seuls 9 sur 197 enfants souffrant de SEP suivi en France ont présenté
une forme progressive, dans la cohorte de Mikaeloff et al et les formes
progressives dans les autres séries est aux alentours 2 et 7%.
Bilan Paraclinique
> IRM
L’IRM est l’examen clé du diagnostic. Mikaeloff et al ont défini
des facteurs pronostics de récidive : la présence de lésions
perpendiculaires au grand axe du corps calleux et la présence seule des
lésions bien définies sont prédicateurs d’une rechute rapide.
> La ponction lombaire
La ponction lombaire est informative si elle montre une réaction
inflammatoire modérée avec la présence d’une synthèse intrathécale de
bandes oligoclonale d’IgG qui est présente chez 45 à 64% de patients
ayant une SEP.
Evolution
La principale préoccupation dans
cette maladie est de déterminer le risque du handicap et des récidives
et parfois ces deux facteurs peuvent être associés.
> Handicap
Renoux et al ont montré que les SEP
survenant dans l’enfance progresse vers une forme secondairement
progressive 10 ans plus tard que ceux des formes adultes mais l’âge de
survenue est 10 ans plus tôt.
Il existe 4 facteurs pronostics du handicap chez les enfants :
le nombre de poussée (qui est une variable dépendant du temps), la
présence de séquelles après la première poussée, la forme
polysymptomatique et une forme progressive.
Dans les formes cliniques, il a été montré que le risque de
survenue de SEP dans les NORB est d’environ de 36% des patients après un
suivi de 2,4 ans et dans des séries rétrospectives, ce risque après la
survenue d’une névrite optique durant l’enfance peut aller de 15% à 42%.
A l’opposé de ces résultats, la SEP n’est pas fréquemment
diagnostiqué après un épisode aigu de myélite transverse isolée chez
l’enfant. La première poussée s’est manifestée sous forme d’une myélite
transverse isolée chez 13 des 168 enfants (18%) présentant une SEP dans
notre première étude de cohorte.
Par ailleurs, Mickaeloff et al ont décrit
un score de sévérité, le score Kidsep. Ce score est calculé lors de la
2ème poussée et permet de prévoir la probabilité d’absence de récidive
ou d’absence de progression à un EDSS > 4. Les facteurs pronostics de
sévérité permettant de calculer le score sont:
- Sexe féminin
-
La survenue d’une deuxième poussée < un an
-
Absence de troubles de la conscience sévères
-
Une évolution progressive
-
Des critères IRM de récidives:
-
Présence de lésions bien limitées
-
Lésions perpendiculaires au grand axe du corps calleux
Pour calculer, la valeur de chaque facteur est multipliée entre elle
et le résultat est ensuite comparé à 4 quartiles ayant des probabilités
d’absence de récidive décroissante. Par exemple, un score à 8,19 est
proche du quartile 4 qui représente une probabilité d’absence de
récidive ou d’absence d’une progression à un EDSS à 4, de 10%. Ce score
est actuellement en cours de validation.
> Traitement
Les poussées sont traitées par des bolus de corticoides :
Un traitement de fond se justifie à partir du moment où l’enfant
présente plus de 2 poussées en moins d’un an avec de facteurs de
gravité, tel le sexe, l’absence de troubles de la conscience, la
présence de critères IRM. Ce traitement de fond est constitué par les
Interferon 1b1a ou 1b ou la Glatiramer acetate (Copaxone).
D’autres traitements immunosuppresseurs (Cyclophosphamide,
mycophénolate mofetil) sont aussi possible mais aucune études n’a montré
leur efficacité.
Le Natalizumab, un anticorps anti VLA4, est en cours d’étude chez les adultes.